5 avril 1962
Michel Bourgeois, de la faculté protestante de théologie, comparaît devant le tribunal militaire de Paris. Michel a 26 ans, est marié et père d’un enfant. Le procès se déroule devant une salle comble. Beaucoup ne pourront pas entrer. La qualité et le nombre des témoins y est pour quelque chose : M. Peyre, B. de Cazenove, Alain Masson, camarade étudiant de Michel, Joseph Pyronnet, le pasteur Hornus, le pasteur Mathiot, le pasteur Roser, du SCI, et André Dumas, professeur de Michel.
On entend lecture des lettres du pasteur Jacques Beaumont, du professeur Ricœur et du professeur Michaeli.
L’accusé, qui est défendu par Me Jean-Jacques de Félice, désireux de vider son acte de tout contenu politique pour le placer sur celui de la conscience religieuse, réaffirme son désir de servir son pays, même dans un service dangereux, mais non pas militaire.
Le réquisitoire, très modéré, demandait 8 mois de prison minimum.
La condamnation est de 6 mois, avec sursis ; il semble que la compréhension du tribunal soit un pas vers l’obtention du service civil…
Compte rendu de son procès, voir les annexes fin 1962.
5 avril 1962
Paul Grosz est transféré à Fresnes, en vue du jugement du 11, dont il est l’un des inculpés.
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6 avril 1962
À Landau (Allemagne), le tribunal militaire juge Gilbert Schmitz, employé de banque à Mulhouse, arrêté le 9 août 1961. Il avait rejoint l’Action civique non violente après 6 mois passés sous les drapeaux. Des amis de Mulhouse sont venus assister à l’audience. Parmi les témoins, signalons le Père Nicolas Wendling de Cernay, le RP Congar, de Strasbourg, le pasteur Fischer et Jean-Jacques Hirtz, de Mulhouse, Michel Lefeuvre.
L’accusé, quoique fatigué, reste particulièrement ferme et inébranlable. Me Hoffet, de Strasbourg, assure une chaleureuse défense. Mais le tribunal reste inflexible : 18 mois de prison.
Le même jour, à Paris, Michel Mainguy, étudiant, est jugé pour le renvoi de son livret militaire. Défendu par Me Pierre Stibbe, qui insère le geste de Michel dans la demande qui est faite pour un service civil, il se voit infliger 3 mois de prison avec sursis, 100 NF d’amende et un an de privation des droits civiques.
7 avril 1962
José Dillenseger ouvre le jeûne à Dijon, accompagné par Joseph Pyronnet, Hamdani Lakhal Hayat, musulman, Georges Abadia, israélite, Jacques Drouet et Antoine Robini. C’est durant ce jeûne que seront écrites les lettres au président de la République, pour Jouhaux, et au président Farès. Voir les annexes fin 1962
11 avril 1962
À la 10e Chambre correctionnelle a lieu le procès des 14 « Jack Muir » qui s’étaient enchaînés aux grilles de Cluny en décembre 1960. Ils sont inculpés de « participation à manifestation non déclarée ». Le pasteur Roser, le RP Régamey et Gilbert Cesbron, témoins, évoquent tour à tour, ce qu’est pour eux la non-violence et, devant une salle d’audience bondée et attentive, Me Paul Baudet sait chaleureusement défendre la position des inculpés et les moyens qu’ils ont utilisés dans leur action. Verdict : 300 NF d’amende à chacun, sauf Jo, qui n’a que 200 NF d’amende, et Marie Faugeron qui est acquittée.
15 avril 1962
Christian Fiquet, de Marseille, est transféré à l’Étape où il retrouve trois camarades.
2 mai 1962
Les volontaires qui ne sont pas en prison travaillent à l’aménagement d’un club de jeunes, destiné aux « blousons noirs » de Marseille.
5 mai 1962
Après avoir été bibliothécaire à la prison de Chambéry, Michel Hanniet passe quelques jours à Fresnes, puis est affecté, sur sa demande, à l’éducation des jeunes délinquants, à la prison de Rouen. Il y fait aussi du sport, mais il ne bénéficie pas, malgré son droit, du régime para-politique (dit régime A).
8 mai 1962
A la 14e Chambre correctionnelle de Paris, Jacques Drouet affronte un tribunal particulièrement hostile qui l’accuse de lâcheté, car il a renvoyé son fascicule de mobilisation.
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Malgré l’excellente défense des témoins, le pasteur Roser, l’abbé Bonnechère et Georges Abadia, ainsi que de l’avocat Me Déodato, Jacques sera condamné à huitaine, à un an de prison avec sursis, 500 NF d’amende et 5 ans de privation des droits civiques.
8 mai 1962
Un disciple de Vinoba Bhave, Jagannathan, de passage à Paris, fait une conférence très écoutée sur la réforme agraire entreprise par Vinoba dans l’Inde. Lui-même est responsable de cette réforme – appelée Boudhan ou don de la terre – pour tout le district de Madras.
9 mai 1962
Michel Bourgeois, après un mois de repos pris à l’issue de son jugement, revient se livrer à l’autorité militaire qui le recherche. Mais l’Église réformée de France, qui a entrepris des démarches pour lui obtenir un sursis jusqu’à la mise en vigueur d’un éventuel statut, lui demande d’attendre la réponse desdites autorités. Voir déclaration ci-contre.
14 mai 1962
À Nantes a lieu le procès des cinq « Yves Bel » emprisonnés depuis le 23 mars.
Un tribunal attentif et compréhensif rejette l’inculpation d’« outrage à magistrat » pour ne retenir que celle de « manifestation non autorisée ». « Le mobile était empreint de noblesse et de générosité, mais nous sommes là pour faire respecter la loi… »
La salle est comble. Les inculpés étaient outre le véritable Yves Bel, Claude Michel, Henri Bouteiller, Claude Pustilnicov, de Paris, et André Ruff, serrurier, de Nancy. Les témoins : M. Forget, secrétaire à la section Métaux CFTC, l’abbé Rouaud, aumônier d’ACO, Emmanuel Rival, ex-responsable jociste, camarade d’Henri Bouteiller, et Jacques Drouet.
Me Gisèle Luneau ayant merveilleusement expliqué l’attitude des accusés, le tribunal condamne chacun à 100 NF d’amende et les met en liberté le soir même.
Voir ci-dessous le témoignage de Marie-Claire Guiader-Voron.
14 mai 1962
Michel Bourgeois se rend à la caserne
La demande de l’Église réformée de France étant rejetée, Michel Bourgeois, accompagné d’une délégation de cette Église, se rend à sa caserne, à Versailles, où il est écroué.
Claude Voron est transféré à l’Étape.
25 mai 1962
Alain Larchier est jugé devant le tribunal militaire de Lyon. Il est condamné à 2 ans de prison.
28 mai 1962
Yves Bel rejoint le chantier de Marseille : finition du club des jeunes, et aménagement d’un centre d’accueil pour les rapatriés d’Algérie anciens harkis.
Marie-Claire Guiader-Voron raconte le chemin qu’elle a suivi : « Au départ, la guerre, pour moi, c’était de l’autre côté de la Méditerranée, je n’avais ni frère ni cousins impliqués. Pendant la guerre 39-45, la famille avait assez payé, mon père, résistant, est mort en déportation, la guerre ce n’était plus mon affaire. « Un jour, avec des copains, dont Marcel Hladik, on m’a interpellée : toi, chrétienne, qu’est-ce que tu penses de la torture en Algérie ? Torture ? Je n’en pensais rien. Puis, j’ai rencontré Jean Goss dans le groupe que je fréquentais à la « cabane » de Champigny-sur-Marne, et la réflexion sur la non-violence s’est infiltrée en moi. Un goutte à goutte qui m’a conduite à rencontrer le groupe des Amis de l’Arche à Nantes où j’étais enseignante. « Je me suis retrouvée à une réunion à la communauté de l’Arche à Bollène (Vaucluse) où se trouvaient des objecteurs. C’était le choc et le réveil. J’ai enfin entendu : guerre, Algérie, objecteur et aussi insoumis à une guerre précise, et la question sur la torture est revenue, et je me suis renseignée. « De retour à Nantes, j’ai rencontré Josette et Yvon Bel qui demandaient de l’aide pour son arrestation et pour son procès. Je m’engage dans cette action, puis fais connaissance avec Claude Voron pour continuer sur ce chemin avec lui. » (Extrait de notre livre) |