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A PROPOS DES FEUX DE FORETS Septembre 1965
Article mis en ligne le 1er avril 2013
dernière modification le 1er mai 2013

par PS

Sans aucun doute, c’est l’homme qui met le feu à la forêt : mégots jetés au hasard, ordures ménagères des communes, imprudences de toutes sortes… Les causes naturelles sont à éliminer. Pourtant le feu n’a de chance de se propager avec ampleur que par fort mistral et lorsque la chaleur estivale fait descendre le degré hygrométrique en de ça d’un certain seuil connu des spécialistes. Le nombre de jours qui présentent de telles caractéristiques est relativement restreint (23 en 1964).

Cependant l’importance des incendies ne peut se comprendre que si l’on tient compte de deux données habituellement négligées.

D’abord, la forêt méditerranéenne n’a plus le rôle qu’elle avait autrefois dans l’économie régionale. Le bois de chauffage n’a plus la même importance domestique. Les branches mortes utilisées pour les fagots des boulangers, sont aujourd’hui laissées sur le sol et forment un combustible de premier choix. Les chemins d’extraction sont abandonnés. L’homme se désintéresse de la forêt puisqu’elle n’est plus rentable.

On ne s’étonne plus alors qu’elle soit impénétrable aux véhicules des pompiers et que les coupe-feux entre les collines y soient inexistants. Le feu n’a plus qu’à faire ses ravages. Le villageois y est souvent indifférent tant que son propre bien n’est pas en danger. Les pompiers viendront moins sauver la forêt que combattre le feu et protéger les "campagnes" (les fermes). La forêt brûle parce qu’elle est devenue apparemment inutile.

Par ailleurs, dans la lutte même contre l’incendie, deux conceptions s’affrontent et parfois se heurtent à l’avantage du feu qui progresse.
La méthode des pompiers volontaires locaux est faite d’expériences vécues, d’efforts mesurés, mais elle bénéficie d’une bonne connaissance du pays et des habitants. Cependant le montant des rémunérations, fonction de la durée des interventions, est défavorable à l’efficacité rendue souvent précaire par le manque de matériel et de personnels.
Elle s’oppose à la conception officielle, venue d’en haut, qui cherche davantage à s’appuyer sur un commandement hiérarchique et autoritaire sans connaissance réelle du terrain. Elle agit davantage par vaste déploiement de moyens et ménage peu les susceptibilités locales. Derrière tout cela se cache un problème politique. Les autorités désirent un commandement unique entre les mains de la Protection Civile et veulent soumettre les Corps de Pompiers locaux à une discipline toute militaire. Mais le commandement ne donne pas la compétence.

Ainsi le feu profite de ces antagonismes. Gageons que l’autoritarisme aura raison du savoir-faire.

B.T.V.